Des animaux à 5 yeux, des crabes à flagelles, d'autres avec des tentacules et des piquants, ça n'existe pas ? Non bien sûr ça n'existe pas... Mais ça a existé !
En 1909 sur le site de Burgess dans le Parc national de Yoho, côte ouest du Canada, le paléontologue américain Charles Doolittle Walcott (1850-1927) fit une découverte qui bouleversa sa vie mais aussi celle de tous les scientifiques du monde.
Il venait de découvrir des fossiles totalement inconnus et étranges. Non seulement les animaux dont ils provenaient, étaient à corps mous (qui normalement ne donnent pas de fossiles puisque ce sont les os qui laissent les traces), mais surtout les formes de ces animaux étaient totalement inédites voire absurdes. On les nomma les animaux de la faille de Burgess ("Burgess shale").
Ces animaux disparurent massivement avec la première des 5 Grandes Extinctions de Masses, l'extinction du Cambrien vers -480 millions d'années. Leurs disparitions laissèrent place à de nouvelles formes de vie, dont l'article ne traite pas ici.
Nous allons donc voir ensemble quelque uns de ces animaux qui vivaient sur Terre (plus précisément dans l'eau) il y a 500 millions d'années, c'est à dire à la période géologique du Cambrien moyen. Préparez-vous à un voyage complètement psychédélique.
Les illustrations de cet article sont des dessins d’après des informations obtenues par l’étude des fossiles. La plupart de ces animaux ne mesuraient que quelques centimètres. Il faut savoir aussi que l’on trouve ces animaux sur toute la surface de la terre. La simplification du nom faille de Burgess n’est là que pour une raison historique puisque c’est ce site qui les a mis en évidence.
On commence par Opabinia Regalis. Qu’a donc de si particulier ce petit animal ? Rien, si ce n’est 5 yeux et une trompe terminée par une pince dentée ! Oui vous avez bien lu. Regardez-donc la reconstitution de cet animal.
Opabinia Regalis, un "truc" jamais vu jusqu'alors. Image prise sur ce site.
On pense qu’il était carnivore et que sa trompe devait être une mâchoire extensible lui servant à capturer ses proies : on peut voir une animation sur ce site http://evolution.berkeley.edu/evolibrary/article/cambrian_06.
Cet animal a donné du fil à retordre aux scientifiques. Imaginez un ver avec 7 paires de tiges rigides d’un côté de la longueur et 7 paires de tentacules souples de l’autre. Où était le haut, où était le bas ? On a même pensé que cet animal pouvait aussi bien marcher sur le ventre que sur le dos. Il fallait bien qu’on lui donne un nom onirique : Hallucigenia.
Finalement, il semble que cela soit les tentacules souples qui servaient au déplacement.
Hallucigenia, longtemps on s'est demandé comment on devait le représenter. Image prise sur ce site.
Ce site http://www.bekkoame.ne.jp/~ishmnn/java/hallucigenia/hallucigenia.html présente une petite animation de sa marche.
Dinomischus ressemble plus à une fleur qu’à un animal. Il est vrai que nous sommes coutumiers du fait de nos jours avec les anémones de mer. Il semblerait que les 2 trous dans le centre de la "fleur" soient la bouche et l’anus d’un système digestif en U.
Dinomischus, l'animal fleur. Image prise sur ce site.
Le géant de ces lieux semblait être l’Anomalocaris. Un mètre (donc une force herculéenne par rapport aux autres animaux), des yeux à facettes (sûrement les premiers de l’évolution et donnant un avantage de prédation indéniable) et enfin une paire d’appendices préhenseurs attirant les proies vers la bouche circulaire, devaient lui donner la place du maître des mers de l’époque.
Anomalocaris, le roi de l'époque. Image prise sur ce site.
Une demi-sphère avec des écailles et une double rangée d’épine ? Voici Wiwaxia.
Wiwaxia, le mollusque-hérisson. Image prise sur ce site.
Vous avez vu le film "Alien" dont le monstre et les décors proviennent de l’artiste Hans Ruedi Giger (site officiel de cet artiste) ? Voyez donc Marella ou le crabe dentelé, on a l'impression qu'il sort de l'imagination débordante de cet artiste.
Le plus petit (environ un centimètre) de tous les animaux présentés dans cette page, c’est aussi celui que l’on trouve en plus grande quantité sur le site de Burgess.
Marella, un animal très esthétique. Image prise sur ce site.
Et enfin, je vous présente notre arrière-arrière-arrière-arrière-...arrière-grand-mère : Pikaïa !
Comment peut-on être sûr de cette filiation ? Tout simplement parce qu'il s'agit du tout premier chordé, c'est à dire le tout premier animal ayant une colonne vertébrale. Tous les animaux actuels avec une colonne vertébrale (nous compris) descendent de ce petit animal (4 centimètre environ). Saluez donc le tendrement.
Pikaïa,notre ancêtre. Image prise sur ce site.
Note : il semblerait qu'un chordé plus ancien ait été découvert en 2002 : le Haikouichthys Ercunensis. Information à prendre avec précaution. Je modifierai cet article en fonction d’information que je pourrais obtenir.
Allez et pour finir, rêvons un peu et délectons-nous de ces 2 visions d’artiste de la manière dont pouvait être la vie à cette époque.
On peut reconnaître un Opabinia attrapant un Aysheaia (animal non présenté dans cet article). En bas à gauche, on trouve 2 Dinomischus et à droite un Hallucigenia. Dans le fond, on peut voir un Nectocaris (non présenté dans cet article). Image prise sur ce site.
En gros plan on voit un Anomalocaris ayant capturé un Trilobite. De ci, de là, on peut reconnaitre tous les animaux présenté dans cet article et quelques autres en plus. Image prise sur ce site.
Comme quoi, parfois la réalité dépasse les élucubrations de certains films de science-fiction.
Sources :
- Cours de biologie ou de géologie en faculté de sciences.
Pour aller plus loin : Afin d’alléger cet article, je n’ai mis que quelques uns de ces animaux trouvés dans la faille de Burgess. Il en existe d’autres tous aussi spectaculaires. N’hésitez pas à vous balader sur le net (de préférence sur les sites universitaires) afin de satisfaire votre curiosité.
Voici néanmoins un florilège de quelques sites :
http://www.burgess-shale.bc.ca, le site officiel de cette faille de Burgess.
http://www.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/s4/explosion.biodiversite.html, très accessible et suffisamment complet.
http://www.washington.edu/burkemuseum/bshale/gallery.html.
http://nature.ca/notebooks/francais/multicel.htm.
http://cgc.rncan.gc.ca/paleochron/index_f.php.
http://blog.empas.com/space0906.